Voici donc notre petite histoire…

Zoé a 5 ans. Elle est en pleine forme. Petite brunette aux yeux bleus, elle est intelligente, vive, câline et créative. Nous n’avons jamais considéré Zoé comme une « enfant cardiaque ». Depuis sa naissance, Zoé vit comme tous les enfants. Elle a toujours « bien toléré » son problème cardiaque. Une personne qui ne connaît pas Zoé et la rencontre pour la première fois ne soupçonnerait pas qu’elle est suivie pour son coeur.

C’est pour cette raison que j’ai arrêté de lire la revue ‘petit coeur’.  Sa lecture m’attristait et me faisait paniquer. Je ne me retrouvais pas dans les histoires racontées. Je trouvais qu’elles étaient toujours plus graves que la nôtre. Zoé est née avec une malformation cardiaque; un canal atrio-ventriculaire. On a découvert lors d’une visite de contrôle à 3 semaines de sa naissance qu’elle avait un « souffle au coeur ». Après examens et contrôles de ‘la question’, et comme Zoé se portait comme un charme, nous avons pu attendre ses 3 ans pour l’opérer (attendre que elle soit plus costaude et que son coeur soit plus gros et donc plus facilement ‘réparable’). Elle a été opérée en juillet 2006. L’intervention s’est déroulée sans problème, Zoé nous a épatés. Nous sommes même sortis de l’hôpital 2 jours plus tôt que prévu. Elle garde une médication quotidienne qui ne pose aucun souci.

Bref, vous allez dire mais alors où est le problème!

La seule chose qui me fait dire que le problème cardiaque de Zoé laisse des traces, c’est le point de vue psychologique.  Mon mari n’est pas trop de mon avis. C’est vrai… tout s’est toujours bien passé… SAUF les mises au lit, les moments de séparation. Ca a toujours été un moment difficile pour Zoé.  Un moment que nous finissions par redouter tant c’était pénible. Tous les moyens étaient bons pour éviter de se retrouver seule dans son lit (j’ai soif, je dois faire pipi, j’ai chaud, je veux pas être toute seule dans mon lit…etc, etc). Jusqu’à parfois 1h30 de mise au lit, beaucoup d’énervement, de cris, de pleurs, de punitions, de câlins, de derniers bisous et re-derniers bisous. Et puis il y a avait ces réflexions qui me laissaient bouche bée :  » je ne veux pas devenir une maman parce que je ne veux pas que vous soyez morts » ou  » Et demain, je vais me réveiller? Et vous serez là? ».. etc. Même son sommeil était régulièrement interrompu par ces fameuses « douleurs de croissance » (si vous allez voir sur internet ça correspond à des douleurs au niveau des os et des articulations surtout aux membres inférieurs et surtout la nuit chez les enfants) comme si grandir lui faisait mal..! Après que chacun y ait été de son petit conseil (et si tu essayais ceci ou cela, plutôt comme ci
ou plutôt comme ça…) ou que l’on ait banalisé l’événement (bah.. aucun enfant n’aime d’aller au lit, ça va passer avec le temps…); j’ai décidé d’arrêter de faire l’autruche.  J’ai retracé l’histoire de Zoé.  J’ai toujours fait bien attention de tout expliquer, les faits, l’opération, le coeur.  J’ai lu et relu le livre « petit Pierre ». Je n’ai jamais menti, j’ai prévenu et préparé. Bref, je ne trouvais pas la faille. J’ai téléphoné à une amie psychologue (« bah tu vas pas encorealler remuer tout ça »; « un psy, pfff!! on n’est pas fou qd même! »; « un psy pour quoi faire, tout va bien?! »).

Et elle m’a posé LA question.  ??? « Et tu lui as expliqué ce que vous vous avez ressenti?  Vous lui avez expliqué votre désarroi et votre tristesse vis-à-vis de son problème cardiaque??? » Et j’ai répondu NON!!

Pensant bien faire, nous avons passé sous silence nos émotions « pour ne pas l’inquiéter ». Sans doute, qu’elle a ressenti ce qui transpirait d’émotions et qu’elle s’y est accrochée sans savoir ce qui se passait. Cette panique masquée qui fait qu’elle n’ose pas nous quitter!!  Rien à faire, nous avons quand même vécu quelque chose d’EXTRAORDINAIRE. Nous n’avons jamais mis de mots sur notre vécu et notre ressenti. Alors, j’ai retracé sous forme de petites histoires, je glisse un mot de temps en temps. Et j’ajoute des phrases du genre « et papa et maman étaient tristes »; « et on s’inquiétait parce que c’est quand même grave si le coeur est malade » ; « et maman et papa ont pleuré »…  Mais surtout je clôture par des échos positifs : « maintenant, le petit coeur est réparé et papa et maman ne sont plus inquiets »;  « Zoé n’est plus malade et papa et maman ne sont plus tristes parce que, sur la télé de madame Barréa, le coeur de Zoé va bien ; je suis très fière de toi, maintenant on peut même laisser Zoé chez papy et mamy pcq on sait que Zoé va bien…  on n’est plus inquiets!

Et croyez le ou non cela fait 2 mois que les mises au lit sont plus sereines.  Même chez papy et mamy ça a été sans larmes!  Il faut toujours un dernier bisou et un câlin (normal!!)… ce petit travail n’est pas fini… je continue de glisser un petit mot de temps en temps…  Mais c’est beaucoup mieux!  Et les douleurs de croissances s’espacent et se font de plus en plus légères!  Voilà donc notre petite histoire… je ne néglige plus le côté psy des choses que je croyais secondaire et qui m’a finalement rattrapée.  Je mets des mots sur les choses, les faits et les émotions et apparemment tout le monde s’en porte mieux.

En espérant que ces quelques phrases puissent aider d’autres personnes.
Bien à vous.
Mélanie