Salut toi,

Moi c’est Emma, 19 ans, transplantée du cœur depuis 6 ans.

Je voulais te partager mon témoignage, celui d’une vie qui bascule, d’un deuil de la jeune fille que j’étais, mais tout s’est arrangé, et je suis là pour tout te raconter !

De moi à toi, je voulais te dire que, je sais, je comprends, et que oui, c’est difficile, mais tu vas y arriver !

Alors je vais t’expliquer à cœur ouvert, sans filtre.

Tout d’abord, comment j’en suis arrivée là ?

J’étais une petite fille de 11 ans très sportive, et qui dit sport, dit contrôles de ma santé physique.

Je faisais donc de la plongée et pour pouvoir aller plonger en mer, je devais avoir un rapport du médecin me disant que tout allait bien…

Mais seulement, cette simple visite chez mon médecin a fait basculer ma vie et celle de mes proches.

Donc de là, s’enchainent contrôles divers et variés, de la peur, de l’angoisse, mais en quelque sorte, je me sentais prête. Je ne sais pas pourquoi ni comment, mais la petite fille de 11 ans, était prête telle une guerrière à faire face à tout cela !

On m’apprend que, mon petit cœur ne va pas bien, qu’il est malade. L’équipe de soins de Saint Luc m’a expliqué, simplement mais comme à une adulte, ce qui se passait. Et je leur en serai à jamais reconnaissante !

En fait, la valve de mon cœur ne se fermait pas bien, et le sang oxygéné et non oxygéné se mélangeaient. Alors il en suivit un traitement, qui fonctionna pendant quelque temps. Et puis une première opération…

Alors oui, j’ai eu peur, de tellement de choses, mais j’aimais tellement la vie que j’étais prête à tout !

Cette première opération avait pour but, grâce à un anneau, de faire fonctionner mon cœur correctement.

L’opération fut une réussite !

Tout se passe super bien, une petite cicatrice que je découvre sur mon torse de jeune fille, m’effraye un peu…

Mais en ce qui concerne les cicatrices, on va y revenir plus tard…

Après cette opération tout se passe bien, des contrôles réguliers et puis de plus en plus espacés, signe d’une bonne récupération !

Tout le monde se dit VICTOIRE !

Et oui, pendant 1 bonne année, tout s’est bien passé.

Mais, parce que oui, malheureusement il y a un mais… aux environs du mois de mars, avril de l’année 2014, je m’affaiblissais peu à peu, je perdais du poids, j’avais froid tout le temps, mon corps souffrait. Personne ne comprenait vraiment ce que je vivais alors, voilà je continuais à vivre comme ça, en m’habituant peu a peu à cette douleur et à ce corps fatigué.

Plus tard, les vacances de l’été 2015 ont été un vrai supplice pour moi. Mes lèvres devenaient bleues, je m’affaiblissais encore, je ne mangeais presque plus rien. Mais je tenais le choc et je me réconfortais en me disant que cela n’était que passager.

Puis vint la rentrée de septembre, tant attendue, me voilà en 2ème secondaire !

Sauf que, celle-ci fut encore plus difficile que prévue. Je commençais à ne plus manger du tout, à avoir du mal à me déplacer, j’étais essoufflée au moindre effort, je dormais assise, mon corps souffrait.

Et puis vint cette fameuse consultation de routine du 14/10/2015 qui fait basculer ma vie encore davantage.

Mon cardiologue pédiatrique m’explique brièvement que je ne rentrerai pas à ma maison, qu’il faut que je sois hospitalisée de toute grande urgence. Mon cœur était très gros dans ma poitrine, il était trop fatigué, il ne fonctionnait plus. 

Après ce bouleversement, je suis hospitalisée, et je ne savais pas encore à quel combat j’allais être confrontée. 

À partir de cette hospitalisation, je me suis « relâchée », je me sentais en quelque sorte soulagée, comprise et entre de bonnes mains, mon corps et mon cœur étaient en si mauvais état et si fatigués que j’ai dû être placée aux soins intensifs… 

On m’apprend, ainsi qu’à mes parents, que je vais devoir être transplantée… 

Je tiens le choc, c’est une nouvelle difficile à entendre, d’autant plus que je suis en très mauvais état… 

En si mauvais état que je reçois énormément de médicaments et que je dois être placée sous ecmo, sous cœur artificiel… 

Ce fut très impressionnant pour mes proches qui me voyaient de l’extérieur, et très douloureux pour moi, de l’intérieur. 

A partir de ce moment-là, j’ai vécu pendant environ 9 semaines dans une bulle… 

Aucun moyen de communication avec les autres, ce fut, je pense un des moments les plus difficiles. 

J’avais l’impression d’être prisonnière de moi-même. 

Et puis, ce jour tant attendu arriva : « Un cœur pour Emma ! » 

Il arriva dans la nuit du 13 au 14 décembre 2015, comme un cadeau de Noël un peu en avance ! 

Comme un vent de soulagement, entre joies, peurs, angoisses et attentes. 

L’opération fut tellement longue mais fut un succès ! 

Mais la petite Emma que j’étais n’était pas au bout de ses peines… s’en suivirent environ 7 opérations à cause de diverses complications, … 

A un moment, je me demandais si on allait me laisser en paix, mais je savais qu’ils faisaient cela pour mon bien. 

Entre respirateurs, soins, douleurs physiques et morales et médication forte, cela n’était pas de tout repos… 

Peu à peu, mon état clinique s’améliore, je commence à aller mieux, mais, ce n’était que le début d’une longue rééducation… parce qu’après tout ce temps alitée, mes muscles avaient fondu… je pesais 29 kilos… 

Alors tout se réapprend peu à peu grâce aux kinés, et pour moi réapprendre à marcher est, ce qui fut le plus difficile ! 

Je suis sortie non pas sans émotions des soins intensifs… 

(Je ne suis pas la seule à avoir versé une petite larmichette, car les soignants sont devenus une vraie seconde famille pour moi, je ne les remercierais jamais assez pour ce qu’ils ont fait). 

Et puis reprendre du poids, manger, bouger, un long réapprentissage de tout a suivi ! 

Redécouvrir mon visage, boursoufflé à cause de la cortisone, retrouver mon corps de jeune fille, meurtrit par toutes ces péripéties, réapprendre à l’aimer, à comprendre et à savoir partager ma différence. 

Alors oui, je sais que les cicatrices sont difficiles à accepter, à regarder, mais je me suis toujours dit qu’il fallait que j’en prenne soin. Car elles sont le synonyme de tout ce que j’ai vécu, de mon passé, qui fait de moi la femme que je suis en train de devenir. Parce qu’au-delà de l’aspect physique, au-delà du corps qui souffre, c’est également un mental qui souffre. Il faut te laisser du temps, lui laisser du temps. 

Et surtout, le plus important, apprendre à chérir et à aimer ce nouveau cœur. Cela s’est fait chez moi, tout naturellement et je remercie cette personne, mon étoile, qui guide mes pas de là-haut, parce que oui, nous ne faisons qu’un. Chaque jour que fait le monde, j’ai envie de rendre cette personne fière même si je ne la connaissais pas. J’aime à dire que je vis pour deux. 

A l’heure actuelle, tu vois, j’ai encore mal, mon corps est parfois fatigué, et oui à 19 ans, c’est difficile d’accepter cette vie, ces médicaments jusqu’à la fin de mes jours.  

Mais je me suis promise en sortant de l’hôpital, qu’une nouvelle chance s’était offerte à moi et que je n’avais pas le droit de baisser les bras après tout cela ! 

Alors oui, j’en parle naturellement, et c’est pour cela que j’ai eu envie de faire plein de choses. 

Je témoigne dans des écoles, je témoigne ici, « grâce » à tout ce qui m’est arrivé mais aussi, j’ai trouvé ma voie, trouvé mon métier, et ce n’est pas rien ! Et je vais, je l’espère devenir ergothérapeute. 

J’ai toujours dit qu’on m’a tellement donné quand j’étais malade que je veux donner aux gens de l’amour ; la main tendue et l’aide que j’ai pu ressentir à travers eux…  

Et j’ai aussi eu la chance de participer à un magnifique projet photo nommé « Un autre regard ». 

Il avait pour but de montrer les différences, et j’avais envie de partager mon histoire… 

Mais le livre et le projet de mon ami Mickael Mathis, en parlent bien mieux que moi. D’ailleurs n’hésitez pas à aller voir son magnifique travail ! C’est d’ailleurs de son talent que vient cette photo ! 

De part cette expérience riche en émotions, j’ai pu faire de superbes rencontres, tout d’abord le photographe, qui est devenu un très bon ami, et qui avec son talent, m’a permise de me sentir moi, de me sentir belle. D’ailleurs un mur est rempli de photos prisesnt pour cette aventure. 

Cela m’a permis de m’ouvrir un peu plus, car je lui ai partagé une énorme partie de moi, et il a su tirer le meilleur de moi, de nous tous ! 

J’ai aussi pu faire connaissances avec les participants, avec qui j’ai encore des contacts ! 

Alors merci à toi Micka, merci pour tout ! 

Et surtout merci à vous de m’avoir lue ! 

Alors au travers de cette photo et de mes mots, j’espère que tu auras trouvé, des réponses à tes questions, j’espère avoir pu éclairer un peu ta lanterne… 

De plus, j’en profite afin de dire quelques mots à toutes les personnes qui ont croisé mon chemin durant cette période de ma vie de jeune fille. 

Je voulais vous remercier de m’avoir éclairée, de m’avoir épaulée et je pense qu’ils le savent mais je ne leur dirais jamais assez que je les aime, qu’ils sont ma deuxième famille, ma famille de cœur (Et c’est le cas de le dire !). Et que c’est aussi grâce à eux, leur patience, leur dévouement à leur travail, que je suis devenue celle que je suis… ils ont fait tellement pour moi !  

Je voulais également remercier tout particulièrement mes parents pour leur soutient infaillible, pour leur amour et leur dévouement ! 

Et également certains de mes proches, ils se reconnaîtront ! 

Alors à vous tous, qui avez croisés mon chemin, une énième fois merci, pour tout, je vous aime ! 

Et pour finir, à toi, jeune lecteur ou parent, je voulais te dire que, rien n’est facile, c’est vrai mais tout est possible si on y croit, si on se bat ! 

Moi, je crois en toi, tout ira bien, je sais que c’est difficile, mais pense à tout ce que tu as encore à faire ici ! 

Si tu veux me contacter, parler, discuter, tu peux contacter l’association et c’est avec plaisir que je serai là pour toi. 

Des bisous et plein de courage, 

Emma 

Photos de © Mickael Mathis