Au travers de ce témoignage, je veux rassurer les parents qui vont découvrir la cardiopathie de leur bébé.

J’ai mis plusieurs années avant de pouvoir tomber enceinte, le parcours a été semé d’embuches. Je n’y croyais plus vraiment mais je gardais espoir et surtout j’avais confiance en la médecine. Je ne savais pas encore, à ce moment-là, que je devrais garder cette confiance pendant toute ma grossesse et même après.

Après des reports dus à la pandémie, j’ai enfin eu l’autorisation d’être opérée afin de voir ce qu’il ne va pas chez moi. Après cela, commence le traitement médical pour l’intervention qui conduira à ma grossesse. Car oui, Clémence est le fruit de la médecine et le sera jusqu’au bout de sa vie. Notre petit miracle.

Ma grossesse se passe très bien jusqu’au vendredi 11 février 2022 où ma gynécologue m’annonce qu’elle va m’envoyer à St Luc. Je ne comprends pas très bien, je lui demande alors : « après l’accouchement ? » Mais non, elle va appeler St Luc lundi 14 février dès 8h afin qu’ils prennent contact avec nous car elle ne trouve pas les artères pulmonaires. Elle nous annonce alors que Clémence a probablement une malformation cardiaque ; elle nous donne même 2 noms. Soit la tétralogie de Fallot, soit une TGV (transposition des gros vaisseaux). Mon sang ne fait qu’un tour, les larmes me montent aux yeux. J’ai des amies qui ont été dans ce cas, j’essaye de me rassurer en me disant que leurs enfants vont bien maintenant mais en même temps, je me dis pour quoi nous ?.

Ma gynécologue nous dit de ne pas trop y penser, de profiter de notre week-end de St Valentin. St Luc nous contactera lundi pour nous donner un RDV et c’est eux qui confirmeront ou pas cette suspicion de malformation.

Comme après chaque échographie, nous passons chez mes parents. Ils veulent savoir si tout va bien. Je leur annonce la nouvelle et je craque. Pourquoi nous, pourquoi, pourquoi ?

Nous partons le lendemain pour un week-end à Rochehaut, ce devait être notre dernière St Valentin à 2 ; l’année prochaine, Clémence sera parmi nous. Mais l’ambiance n’est pas celle attendue. Baudouin ne dit trop rien et moi j’imagine le pire. Je me dis que finalement ce ne sera peut-être pas notre dernière St Valentin à 2. Il faut vraiment que je m’enlève ces idées de la tête. Nous sommes en 2022 et en Belgique, ils (les médecins) vont me soigner ma puce. Elle sera belle, forte et courageuse.

Le week-end se passe, on profite un peu et comme depuis le début de ma grossesse, je fais attention à tout ; pas une goutte d’alcool, pas de viande rouge, pas de légumes crus, bien dormir, boire de l’eau, …Tout ça pour au final une malformation, qu’est-ce que j’ai fait de mal ?

Lundi 14 février, 10h, alors que nous quittons Rochehaut et que je suis dans une chapelle pour y mettre une bougie, le secrétariat de St Luc m’appelle pour nous donner RDV le vendredi 18 février après-midi.

Encore 4 jours à tenir avant la confirmation…ou pas, mais on préfère se dire que Dr Istace a bien vu. Si jamais St Luc confirme, on ne sera pas déçus.

Le vendredi arrive, nous montons à Bruxelles. Une tempête est annoncée par l’IRM mais c’est déjà la tempête dans mon cœur.

Dr Pierre Bernard fait l’écho et ne dit rien mais je vois bien qu’il y a quelque chose. Il finit par nous annoncer le verdict : tétralogie de Fallot – apso. Qu’est-ce que c’est que ça APSO ? Tétralogie de Fallot, j’ai été lire sur internet mais APSO….

Il me dit aussi qu’il faut faire une amniocentèse pour vérifier les problèmes génétiques éventuels : trisomie, micro délétion du chromosome 22,… C’est quoi encore ce truc ?

Il me dit que ça peut causer des retards (langage, marche, problème dans des matières à l’école, …) et me parle de IMG. WOH WOH WOH, qu’est-ce qu’il me dit là ? Je demande si on regarde à ça chez toutes les mamans et la réponse est non. Juste quand il y a une malformation découverte avant la naissance. Donc si ma gynécologue n’avait rien vu, j’aurais accouché et Clémence serait là. Donc IMG NON NON NON, Clémence aura les soins nécessaires et l’aide qu’il faut. Puis elle évoluera à son rythme. Si elle marche à 18 mois au lieu de 15 en moyenne, on s’en fiche, si elle doit aller chez le logopède, on la conduira,… Combien d’enfants ont besoin de soins ou d’attention.

Le retour à la maison est difficile, je dois rester au repos et je ne fais que cogiter, j’ai beau avoir pris ma décision de garder Clémence, je n’arrive pas à m’enlever de la tête cette micro délétion du chromosome et je passe mes journées à lire des articles sur internet. Je suis la ère à dire qu’il ne faut jamais faire ça et pourtant c’est ma seule occupation. Ce que je lis est parfois difficile à lire et j’imagine Clémence avec tous les symptômes alors je pleure. J’attends les résultats mais le coup de fil tant attendu n’arrivera jamais. Plus tard, j’apprendrai que St Luc a oublié de m’appeler.

Je retourne régulièrement à Bruxelles pour faire des échos et visite chez cardiopédiatre, c’est Dr Carbonez qui s’occupe de nous. Elle est rassurante, confiante car tout évolue bien Elle plaisante avec nous en disant que Clémence fera de la danse en tutu et pas du foot, elle veut même une photo de son 1er cours. Ça nous rassure, elle se projette donc nous aussi on peut se projeter (mais pas dans la danse stp)

Le jour J arrive, 31 mai 2022, j’entre en maternité à St Lucs le soir pour être provoquée afin d’avoir tous les soins directement pour la puce. J’arrive détendue, bizarrement, je n’ai pas peur. On est confiants, on nous a bien expliqué tout ce qui allait se passer et surtout comment ça allait se passer. On avait eu toutes les explications et visité les soins intensifs en amont avec Karine Dekoon.

Clémence voit le jour le 1er juin 2022, toute l’équipe médicale est là, elle est attendue aux soins intensifs pour avoir son prostin et y passer la nuit.

Tout s’est très bien passé, j’ai pu la garder un peu sur moi et ensuite l’équipe médicale l’a prise e, charge, son papa est parti avec elle.

On fait mes soins, on m’explique la suite pour Clémence et on me conduira aux soins intensifs pour aller la voir et la prendre dans mes bras. Elle est paisible.

La suite se passe bien également, Clémence passe une bonne nuit et sera remontée en unité 85 (cardiopédiatrie) jusqu’à son opération. On va lui mettre un shunt, c’est une opération palliative pour lui permettre de prendre du poids avant la cure complète.

L’opération est prévue le 8 juin mais sera repoussée au 10. J’ai une période difficile, je culpabilise, je m’en veux de faire subir ça à mon bébé. Je suis persuadée d’avoir fait quelque chose de mal pendant les 3 premiers mois de ma grossesse, je réfléchis, je ne dors pas. L’équipe médicale est au top et cardiopédiatres, infirmères, Karine viennent me voir à tour de rôle et me disent que je n’ai rien fait de mal, au contraire, je fais tout bien. Ce n’est pas de ma faute mais de la faute à pas de chance. Que tout va bien se passer et que c’est normal que je craque.

Ils sont au top.

Le jour de l’opération est arrivé, Clémence descend au bloc à 8h15, je l’accompagne jusqu’à ce qu’elle s’endorme. Son papa a du redescendre chez nous pour des papiers, je suis donc seule pendant 3 jours mais on est jamais vraiment seule, toute l’équipe est là pour nous soutenir.

A 13h30, Dr Poncelet, le chirurgien, m’appelle pour me dire que tout s’est bien passé, il a mis le gros shunt et il a pu refermer le thorax. Clémence va aux soins intensifs, elle y restera 10 jours après l’opération. Elle avance à son rythme, l’équipe prend bien soin d’elle. C’est long pour nous mais il faut le temps qu’il faut. Un bébé de 9 jours qui doit subir de telles épreuves, il lui faut le temps de se remettre. Elle fera tout bien et il ne faudra pas faire de retours en arrière. Elle remontera en chambre le lundi 20 juin et on sortira le jeudi 23 juin pour le retour à la maison.

Il y a eu des suivis réguliers qui se sont espacés de plus en plus. On allait à Bruxelles et à Arlon.

On sait qu’il y aura sa cure complète bientôt, entre 4-6 mois. Les médecins nous dirons quand ce sera le moment.

En novembre, lors d’un examen chez Pr Moniotte, Clémence a chuté en saturation d’oxygène, elle n’est plus qu’à 78%. Pr Moniotte nous explique qu’il faut penser à l’opération. Ils vont parler de son cas lors de la réunion du lundi et il reviendra vers nous.

Il m’appellera la semaine suivante pour me dire qu’ils vont faire un cathétérisme d’exploration et en fonction de cela, ils programmeront l’opération.

Son cathé à lieu le 19 décembre, il est fait par Dr Carbonez qui est contente car il n’y a rien de neuf, c’est-à-dire, rien de pis et que l’opération sera dans les 2 prochains mois.

Le 16 janvier 2023, nous avons un RDV de contrôle avec Pr Moniotte et RDV avec Dr Poncelet qui va nous expliquer ce qu’il va faire.

Là c’est un peu la douche froide car nous pensions qu’il allait tout faire en une fois. Fermer CIV-CIA, faire la réparation et mettre la VALVE mais ce n’est pas le cas, il va mettre un tuyau en goretex. L’homogreffe sera pour plus tard. Mais bon, on n’a pas le choix de faire confiance et puis c’est le meilleur.

Clémence sera opérée le 9 février 2023. On rentre en clinique le 8 février pour ses examens.

L’opération durera 10h, elle sera sous CEC pendant 5h. L’attente est difficile, la journée interminable. Le coup de fil tant attendu arrivera à 18h22, j’ai déposé Clémence au bloc à 8h30. Quelle journée horrible.

A 21h, on peut aller lui rendre visite aux soins intensifs. Le médecin et les infirmières nous expliquent les médicaments et l’intervention. Un petit cœur est dessiné au tableau afin de montrer ce que le chirurgien a fait.

Le lendemain, elle est déjà extubée. Bien plus rapide que la 1ère fois. Elle restera aux soins intensifs 5 jours et remontera ensuite en cardiopédiatrie. Elle y fera les 400 coups : elle s’arrachera un drain et attrapera le covid, malgré tout ça, elle est en super forme. Elle n’aura pas perdu son sourire.

Depuis cette opération, Clémence va très bien. Elle est pleine de vie, elle a toujours le sourire. Elle est forte et évolue bien, à son rythme. Nous sommes partis en vacances en voiture. Tout s’est très bien passé. En septembre, nous irons en avion. Elle a l’autorisation de Pr Moniotte. Par précaution, nous avons demandé à le revoir la semaine précédent le départ.

Il faut faire confiance à nos bébés, ils sont forts, plus forts que nous.

Depuis que je suis au courant de sa cardiopathie, j’allume une bougie tous les soirs, je prie alors qu’à la base je n’étais pas croyante ; je le suis devenue. Je ne prie pas uniquement pour Clémence mais aussi pour toutes les merveilleuses personnes qui se sont occupées de notre fille ; infimier(es), chirurgiens, Karine, cardiopédiatres et tous les autres. Ce sont des personnes magnifiques qui méritent d’être reconnues et respectées.

Le chemin est encore long et il y aura bientôt son homogreffe mais nous sommes confiants. Clémence est forte, les médecins sont les meilleurs, les techniques évoluent, …

Voici mon témoignage.

Il est long mais j’ai essayé d’être la plus précise possible. J’espère qu’il pourra aider des parents comme certaines lectures ont pu nous aider.

 

Sophie – Baudouin & Clémence.